Article
Octobre
2023
Jean-Michel Pou
Président Fondateur Deltamu
Les étalonnages / vérifications périodiques, ça suffit !

Les petites étiquettes sur les objets nous rassurent depuis longtemps.

Prenons deux exemples pour comprendre (Figure 2.1 et Figure 2.2)

Figure 2.1 Les dates de validité de notre quotidien : exemple 1

Croyez-vous vraiment que Yoplait fixe au hasard, sur le seul rythme du temps que met la terre à faire le tour du soleil, la date « limite » indiquée sur ses produits ? Non, évidemment ! Cette date fait l’objet d’études bactériologiques qui visent à prévoir pendant combien de temps, compte tenu de l’évolution naturelle du monde vivant qui peuple nos aliments, le produit restera sans nocivité pour le consommateur. L’estimation de cette date coûte probablement des dizaines de milliers d’euros et comporte sans doute une marge de sécurité. Nous savons tous en effet, par l’expérience acquise et partagée, produit par produit, de combien, en gros, on peut la dépasser sans risquer de tomber malade. On sait aussi que le dépassement n’est pas le même pour les yaourts et pour le poisson frais… Cette date a donc un vrai sens, procure une vraie sécurité au consommateur, elle est importante à ses yeux. Qui achèterait des yaourts dépourvus de date de péremption ?

D’autres étiquettes nous donnent confiance, même si beaucoup de personnes ont perdu l’origine de cette confiance, qui remonte pourtant à une époque où les Français doutaient tout le temps. Rappelons-nous simplement qu’avant la Révolution française, nos aïeux exigeaient « Un roi, une loi, un poids et une mesure ! ».

Figure 2.2 Les dates de validité de notre quotidien : exemple 2

Dans ce cadre, et contrairement à l’exemple des yaourts, la date participe à installer la confiance dans les quantités échangées, elle ne permet pas de les garantir !

Le principe simple suivant lequel l’erreur de mesure est inexorable (mais peut être maîtrisée) et n’a pas de préférence a fondé la métrologie légale. Puisqu’on ne peut pas deviner la date à laquelle tel ou tel instrument qui sert aux échanges commerciaux va dériver de façon sensible, au détriment du vendeur ou de l’acheteur, et fort du principe que les risques liés à une dérive ne sont, dans le monde des échanges commerciaux, qu’économiques, on peut fixer une date arbitraire de vérification, valable pour tout le monde. Cette date n’exprime donc qu’une validité « légale ». L’instrument peut être utilisé jusqu’à cette date. En la dépassant, le commerçant s’expose à une sanction, même si l’instrument est conforme. C’est le même principe que le contrôle technique automobile. Vous êtes obligé de le faire et de réparer, donc à posteriori, si besoin.

Cette date n’a pas d’autre prétention que celle de garantir la loyauté des échanges. Trop ou trop peu, on n’en meurt pas et un contrôle périodique suffit à corriger d’éventuelles anomalies.

D’ailleurs, dans ce monde-là, un instrument déclaré « non conforme » ne fait l’objet d’aucune autre action que sa maintenance. Pas d’exigence en termes d’études d’impact : ce qui est fait est fait …

Aussi, et de façon inconsciente pour les non-initiés, la petite étiquette sur l’instrument de mesure (Figure 2.3) semble parée de vertus quasi identiques. Tant que la date n’est pas dépassée, comme pour le yaourt, on peut mesurer « en confiance », c’est-à-dire qu’on croit, comme dans la métrologie légale, que la mesure est juste. Malheureusement, et comme nous l’avons vu précédemment, il n’en est rien ! Un instrument parfait ne produirait pas une mesure parfaite car la qualité de cette dernière dépend de nombreux autres facteurs …

Figure 2.3 Cette fameuses étiquette qui nous rassure, à tort …

De ce fait, le métrologue doit concentrer ses efforts sur la détection d’anomalies du processus de mesure « au plus près de leur survenue » plutôt que de d’évertuer à respecter un planning arbitraire qui, finalement, traduit davantage don inutilité qu’une mise à profit de sa compétence.

En effet, en visant un taux de conformité des instruments le plus élevé possible (souvent autour de 95% voire plus), le métrologue conventionnel montre que sa mission est non seulement très coûteuse (les instruments conformes n’auraient pas dû être vérifiés, tout comme une pièce conforme est mesurée pour rien), mais aussi inutile (car il n’a pas vu venir les 5% de problèmes qui peuvent induire des coûts très élevés pour son entreprise).

Le smart métrologue, lui, ne s’attache pas à respecter un planning arbitraire. Il s’emploie à détecter une anomalie sur le processus de mesure au plus vite, si possible, dès qu’elle se produit. Cette anomalie doit ensuite être analysée et comprise pour être corrigée. Finalement, le smart métrologue, qui pratique la périodicité conditionnelle (c’est-à-dire qu’il étalonne ses instruments lorsqu’il doute d’eux), s’enorgueillit d’un indicateur qui lui donne 100% raison, c’est-à-dire que les instruments qu’il envoie à l’étalonnage ont effectivement un problèmes er sont déclarés à 100% « non conformes ». Il s’attache également, et parallèlement, à démontrer que sa gestion de la qualité des mesures cd l’entreprise est efficiente, autrement dit qu’aucun partenaire, client ou fournisseur, ne lui reproche un problème lié à la qualité des mesures.

Ne pas subir des conséquences industrielles liées à une « non-qualité de la mesure » et ne pas étalonner inutilement des instruments sont les deux mantras du smart métrologue. Pour réaliser ces objectifs, il faut bien analyser les incertitudes de mesure, donc leurs causes. Dans ce cadre, une bonne culture statistique s’impose pour garantir des décisions pertinentes.

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