Smart Metrology, le livre – Extraits choisis (3/5)
Didier Nordon, mathématicien de son état, nous a fait l’honneur de rédiger la préface du livre « Smart Metrology, de la métrologie des instruments à la métrologie des décisions ». Dans son style incomparable qu’il est possible d’apprécier chaque moins dans la rubrique « Bloc-Notes » de la revue Pour la Science, il introduit le livre. Il n’aura pas fallu beaucoup de discussions avec lui pour qu’il comprenne l’ambition du livre et ses conséquences potentielles dans le devenir de notre métier …
Venez le rencontrer le 9 Juin à Clermont-Ferrand : il nous fait l’intense plaisir de participer, et d’intervenir au cours de la journée.
Erreur propitiatoire
Einstein jouait du violon. Mais jouait-il bien ? Les témoignages divergent. Il s’en trouve selon lesquels il n’avait pas le sens du rythme. « Monsieur Einstein, votre temps est très relatif », lui fut-il dit un jour. Ce mot est trop beau pour qu’on se risque à en vérifier l’authenticité. Einstein était un physicien fâché avec la mesure !
La notion de mesure a ceci d’universel qu’on peut la violenter avec n’importe quel instrument : j’exprime mes désordres sur un piano. Mon état de mathématicien excuse-t-il mon inaptitude à jouer en mesure ? Mesurer, n’est-ce pas, est une trivialité indigne du mathématicien. Voué à l’abstraction, il n’est pas plus formé à mesurer les temps en musique que, par exemple, les angles sur une figure. On ne l’imagine pas mesurant au rapporteur les angles d’un triangle, constatant que l’un d’eux vaut 90 degrés à epsilon près, concluant que le triangle est rectangle à epsilon près donc que le théorème de Pythagore s’y applique à epsilon près ! En mathématiques, si un angle est droit, il l’est en toute rigueur – soit par hypothèse, soit suite à un raisonnement où il n’y a place pour aucune approximation.
Résumons. Une mesure n’est jamais exacte. Or les mathématiques sont l’exactitude même. Donc la mesure ne les concerne pas : à ne pas aller en mesure, je ne fais pas honte à ma profession …